Land of mine / Les oubliés / Under sandet
Les mots du film :
Extrait du journal de Rasmussen…
Désobéir à la règle, ou la foi dans l’humain
Mélanie Mémin
Les Oubliés est un film dramatique de Martin Zandvliet qui présente une réalité historique très dure : il se passe à la fin de la Seconde Guerre mondiale au Danemark. Le réalisateur nous conte l’histoire de quatorze jeunes Allemands aux personnalités très différentes, envoyés sur les plages de ce pays afin de les déminer. C’est une histoire à la fois tragique et bouleversante : on accompagne ces ados, qui pour plupart meurent, un par un, dans d’atroces souffrances, terrassés par les fracas des mines.
Car, selon moi, ce film cherche avant tout à marquer émotionnellement le spectateur : on retient finalement de ce film très dur, les scènes de complicité, d’amour fraternel, de solidarité, la douleur de perdre un proche. La situation de l’après-guerre en elle-même n’est pas tellement représentée, en dehors de la première scène. On ne voit pas souvent l’horreur et le sang que causent les mines, même si la violence reste omniprésente. Le film est bien plus centré sur le renversement de la vision de Rasmussen, le sergent danois chargé d’encadrer les jeunes Allemands prisonniers. Et c’est ce qui fait la beauté du film.
Un des choix cinématographiques très remarquable de ce film, c’est l’opposition très nette entre les effets de groupe (nombreux plans filmés avec « isocéphalie », c’est-à-dire les têtes à la même hauteur, de façon à créer une uniformité entre eux) et la solitude dans laquelle sont plongés certains personnages, comme par exemple Helmut ou encore Sébastian, deux des jeunes prisonniers ; mais c’est le cas aussi du sergent Rasmussen, avec lequel Sébastian arrivera à construire un lien. De nombreuses images montrent la solidarité, l’entraide entre les personnages (l’entraide face à la nourriture, aux blessures ; les moments de confessions sur leurs vie future, leur projet…) mais aussi la détresse qui les laisse seuls face à eux-mêmes. Finalement, les personnages ont su développer une sorte de fraternité où l’on imaginerait le sergent Rasmussen en père du groupe, et Sébastian comme l’aîné de la fratrie, se sacrifiant pour les autres (comme par exemple lorsqu’il sert à manger à tout le monde en finissant par lui et qu’il ne lui reste que très peu).
La nourriture est d’ailleurs un enjeu très important dans ce film, vu les pénuries alimentaires que subit le pays : les jumeaux prennent le pain d’Elisabeth, la fillette qui vit dans la ferme voisine du camp des prisonniers ; Helmut, affamé, cherche de la nourriture et prend les seules graines qu’il trouve, et qui au final sont de la mort-aux-rats ; ou encore Rasmussen se décide à « voler » à la base militaire des Alliés la nourriture pour les ados.
Durant tout le film, la musique accompagne les émotions du spectateur. Les explosions des mines viennent fracasser le monde ; parfois, le bruit s’efface de la bande-son et un grand silence s’installe en nous. Il n’y a pas que la bande sonore qui opère de cette manière. Tout le film est secoué par ces explosions. Les paysages qui sont tracés tout en lignes horizontales sont perturbés par le fracas des mines qui font voler le sable.
Pour finir j’aimerais parler de deux scènes qui m’ont particulièrement marquée et fait monter les larmes aux yeux. Le sergent réconforte le jumeau qui a perdu son frère pour l’aider à s’endormir. Cette scène m’a énormément émue comme celle où Sébastien se confie au Sergent sur la dune. Ce sont deux moments-clés du revirement dans le comportement du sergent.
Ce film nous fait découvrir une histoire oubliée, des faits réels, une réalité qui nous prend d’assaut tout comme ces jeunes soldats sont pris d’assaut par la peur de la mort. Grâce à un jeu d’acteur émouvant, le film nous transporte dans un univers finalement pas si lointain que ça, où les horreurs de la guerre, malgré la paix, sont encore présentes dans les cœurs et les esprits des Danois mais aussi de tout les Européens. Il rend hommage de la plus belle des façons à ces adolescents morts au début de la paix, mais aussi à des hommes comme le sergent Rasmussen qui ont su ne pas toujours obéir. Son changement de vision à la fin provoque tellement de joie, de fierté chez le spectateur ! C’est pourquoi, pour moi, ce film et son réalisateur méritent les plus grandes acclamations.
Les Oubliés
Margot
Après la deuxième guerre mondiale, le Danemark ressemble toujours à un immense champ de bataille. Sur les plages désertes, rien n’a vraiment changé. Ce sont maintenant des soldats allemands qui se retrouvent sous les ordres de militaires anglais et danois. Ces prisonniers allemands sont, pour certains, très jeunes, seuls loin de leur famille, dans des conditions très difficiles. Ils passent leur journée à déminer les plages danoises, remplies de bombes enfouies sous le sable par des allemands, en prévision d’un éventuel débarquement.
Le film est centré sur quatorze adolescents, qui travaillent sous les ordres d’un sous-officier danois, Rasmussen. Ce dernier ne s’exprime qu’en criant et éprouve une véritable haine pour les Allemands. On voit par exemple au début du film, qu’il frappe un prisonnier allemand jusqu’à ce qu’il s’effondre au sol, parce que ce dernier avait un drapeau danois dans les mains. Cette scène est la première scène du film. On est vraiment dans le point de vue du sous-officier danois : il n’y a pas encore d’image et on entend seulement sa respiration. Ensuite apparaît son visage, de profil et de très près ; puis on voit les prisonniers défiler comme il les voit, lui, depuis sa voiture. Aux jeunes démineurs allemands placés sous ses ordres, il répète à plusieurs reprises qu’il n’a aucune pitié pour eux et qu’ils peuvent mourir sans que ça ne l’affecte. Absolument aucun dialogue n’est possible, même minimal au début du film. Il ne sait que leur crier des ordres, les obligeant à lui répondre en finissant leurs phrases par « oui sergent ».
De leurs côtés les Allemands forment un petit groupe et ils se soutiennent entres eux. Chacun a ses projets d’avenir, et tous ont hâte de retrouver leur famille. Ils parlent de ce qu’ils feront une fois en Allemagne, des métiers qui les font rêver. Le personnage de Helmut se détache des autres, car il est un peu solitaire et il ne croit pas du tout en l’avenir. Il répète sans cesse à ses compagnons qu’ils ne rentreront pas et qu’ils ne réaliseront pas leurs projets respectifs. Il s’oppose au personnage de Sebastian qui, lui, paraît beaucoup plus sympathique. Autres personnages également attachants, les jumeaux, Werner et Ernst qui sont tout le temps ensemble et ne peuvent pas vivre l’un sans l’autre. Ils se soutiennent et s’occupent l’un de l’autre. Lorsque Ernst est malade, ils vont tous les deux voir Rasmussen, et Werner demande si Ernst peut se reposer. Mais c’est le personnage de Sebastian qui est certainement le personnage le plus important parmi les soldats prisonniers. Après l’incident au cours duquel Helmut a voulu s’enfuir, une relation assez tendue s’établit entre les deux personnages et c’est Sebastian qui récupère un peu le rôle de « supérieur » vis-à-vis de ses camarades. On voit que c’est un personnage très généreux qui fait toujours passer les autres avant lui. Lorsque qu’ils peuvent enfin manger quelque chose (et c’est la seule fois dans le film), c’est Sebastian qui « prépare » le repas pour ses camarades et c’est également lui qui se sert en dernier, alors qu’il ne reste presque rien. Il met aussi en place un système pour optimiser la recherche des mines et éviter les accidents. Il tient tête au sergent jusqu’à ce que celui-ci accepte de les laisser utiliser sa méthode : on voit que Sebastian ne l’a pas fait pour lui et pour son image mais pour aider tous ses camarades.
Le film ne se concentre pas que sur le monde de l’armée. Les jeunes allemands dorment dans une vieille bâtisse, située près d’une ferme où vivent une mère et sa fille, très jeune, Elisabeth. La fillette est très insouciante et ne connaît pas la haine comme les adultes. On la voit toujours jouer avec sa poupée dans la cour de la ferme. Et si elle se fait voler par l’un des jumeaux un morceau de pain qu’il partage avec son frère, on retient surtout le dialogue entre les deux personnages et le geste de Werner pour aider la petite fille à soigner sa poupée. Plus tard, d’ailleurs, dans le film, la mère affolée de trouver Elizabeth en train de jouer sur la plage au milieu d’un champ de mines, fait appel aux garçons et c’est Ernst qui la sauve. Comme son frère, il parle avec elle et soigne encore une fois sa poupée. On retrouve ici une scène typique du film : deux personnages filmés de profil, et de près. Sont en effet fréquentes les situations avec deux personnages qui s’entraident, lorsque les bombes explosent par exemple.
Le film est donc construit sur les relations entre les personnages. Au début du film, le sergent à une position très autoritaire par rapport aux jeunes soldats. De nombreux plans le filment face au groupe aligné. Mais il va petit à petit s’attacher à ces adolescents. Il ne montre pas ses sentiments, mais on comprend son évolution par exemple dans la scène où il leur apporte à manger alors qu’il n’en a pas le droit. Une fois qu’ils ont mangé, il crie pour leur demander de se préparer. Plus tard dans le film, le sergent parle avec Sebastian sur la plage. Cette fois, les personnages sont côte à côte, et filmés de face. Pour la première fois, Carl parle avec un des prisonniers sans crier, et pas pour donner des ordres. Il y a ensuite cette séquence où tous les prisonniers s’amusent et se détendent sur la plage avec leur geôlier. On les voit revenir après la partie de foot, tous en ligne, avec le sergent au milieu, au même niveau. La mort de son chien marque un retour en arrière : Rasmussen se referme et recommence à crier. Il oblige ses soldats à quadriller la zone déminée pour vérifier s’il ne reste aucune bombe. Encore une fois on voit tous les soldats indifférenciés en ligne, menacés par la mort imminente. Dans ce film, les plans en ligne accompagnent les plans en duo. On voit par exemple tous les soldats alignés sur la plage lorsqu’ils déminent, et tous les plans de la plage danoise, avec la ligne d’horizon en arrière-plan.
Ce film de fiction, aborde un véritable sujet historique très peu connu dans l’histoire de la Seconde guerre mondiale. Le film présente une situation d’après-guerre difficile dans un pays détruit où manquent les vivres. Le film dépeint également une situation de haine entre deux populations qui se sont fait la guerre pendant près de six ans. L’attachement de Carl pour les garçons qu’il encadre traduit l’innocence de ces derniers, qui se sont retrouvés là par obligation et non par conviction. Et ce que l’on retient du sergent Carl Rasmussen, c’est la manière dont il va tenir la promesse faite à ces garçons auxquels il s’est en définitive attaché, homme juste qui éprouve de l’empathie pour leurs souffrances.
Les Oubliés
Romane Gary
1945. Les Oubliés est un film qui se situe à la fin de la Seconde guerre mondiale et qui retrace l’histoire de ces soldats allemands prisonniers affectés au déminage des côtes de l’Europe, ici le Danemark. Le film se concentre sur un groupe de quatorze jeunes hommes et adolescents qui doivent apprendre à désamorcer les bombes posées par les troupes de leur pays. Un sergent danois, qui apparaît au début violent et agressif, les prend en charge. Entre violence, rage et compassion, ce film fait naître en nous de émotions fortes et nombreuses.
Dès le commencement du film, on nous montre cette violence lors d’une scène particulièrement brutale. Le sergent Rasmussen, depuis sa jeep, regarde les troupes des soldats allemands marcher épuisés et démoralisés. L’un des soldats tient entre ses mains un drapeau du Danemark. A ce moment, Rasmussen rentre dans une rage immense et frappe d’une manière acharnée le soldat impuissant. On sent que le déchaînement du sergent est une sorte de vengeance liée à cette guerre qui vient de s’achever. Cette scène a marqué ma mémoire car on pouvait voir le visage du soldat inexpressif qui se laissait battre, regard vide et qui paraissait mort. Tout au long du film, on assiste au déchainement de la violence et des humiliations sur les prisonniers allemands – plus particulièrement les 14 adolescents qui forment le groupe des démineurs de Rasmussen. On ressent vraiment la souffrance qu’ils éprouvent et l’angoisse présente à chaque scène du film. Mais le réalisateur Martin Zandvliet nous fait aussi ressentir la complicité qui se crée entre ces « frères de guerre », dont le point commun est en fait cette « paix » qui détruit leur vie en quelque sorte car très peu vont survivre. Des liens de solidarité se créent entre eux. Ils essaient de se rassurer en se disant qu’ils vont ressortir vivant de cet enfer : on les voit parler de ce qu’ils souhaitent faire une fois rentrés dans leurs pays, avoir une copine , ouvrir une entreprise de maçonnerie… Et c’est très émouvant.
Pour créer l’émotion, la musique a un rôle très important dans le film. Lors des scènes de tension, elle amplifie nos émotions et nous permet de rentrer dans le film comme si on y était réellement. Et lorsque la musique s’absente, on peut éprouver une appréhension encore plus grande, comme lorsque les soldats désamorcent les bombes. Parfois aussi, le bruit s’efface de la bande son et un grand silence s’installe en nous. La façon dont sont filmées les scènes renforce notre angoisse : les plans rapprochés sur les visages lorsque les jeunes démineurs doivent désamorcer les bombes m’ont fait fermer les yeux à plusieurs reprises ; même effet, avec les plans larges dans lequel on les voit s’éloigner lorsqu’ils doivent marcher bras dessus bras dessous sur toute la plage. Il y a une grande qualité dans les plans de ce film, même si ce n’est pas la première chose sur laquelle on se penche.
Chacun des personnages va évoluer tout au long du film, notamment le sergent Rasmussen qui va s’adoucir peu à peu, se rendant compte que ces jeunes soldats allemands qu’il martyrise ne sont en réalité que des adolescents comme tous les autres. Une des scènes qui m’a le plus touchée est celle où le sergent et Sebastian sont assis sur une dune de la plage et vont commencer à se connaître. Un grand silence est présent au début mais au fur et à mesure la tension présente entre ces deux personnages va se briser et laisser place à une sorte d’amitié. Cette scène m’a vraiment émue car elle nous montre le sergent sous une autre facette.
En sortant du ciné…
M=Mathilde
L=Lucie
S=Solène
Trois jeunes filles sortent du cinéma, après avoir vu le film « Les Oubliés ».Elles échangent leurs premières impressions.
M : Quelle scène vous a le plus choquées ?
L : Pour moi, c’est la scène où ils sont en ligne, coude à coude, pour tester la sécurité de la plage.
S : Moi aussi, cette scène m’a beaucoup marquée car cela m’a paru très pesant et stressant.
M : Je me rappelle qu’ils étaient dix et j’ai pu lire sur leur visage la peur de mourir à chaque instant.
S : Je me souviens qu’au début de cette scène, c’est un lent travelling : on voit les jeunes soldats allemands de dos, un par un et de très près !
L : Moi j’avais la boule au ventre, j’avais peur pour eux en les voyant s’éloigner et quadriller la plage.
M : Moi aussi ! La scène m’a paru très longue alors qu’elle dure moins de deux minutes. J’ai compté : 9 plans !
L : Je m’en souviens, c’est une alternance entre des plans sur les prisonniers sur la plage et des plans sur le sergent et la femme qui habite près de la plage. Les soldats sont montrés toujours de plus en plus loin…
S : Et on ne les voit jamais de face, toujours de dos ou de profil, poussés par deux soldats danois. On voit toujours l’horizon mais la manière de filmer montrait bien qu’il n’y en avait pas pour eux…
M : Oui ! Bien qu’ils soient dans un grand espace, j’ai eu une sensation d’enfermement. Le cadrage enferment les prisonniers.
S : Cette sensation est sûrement due au fait que les soldats Danois les forcent à avancer avec des armes.
L : J’ai aussi remarqué que plus les jeunes soldats allemands s’avançaient sur la plage, plus le sergent s’éloignait.
M : Je pense qu’il avait besoin de prendre du recul sur une dune en hauteur.
S : De là, il avait une vue d’ensemble sur la plage et la mer. Ce qui lui permettait de voir les soldats progresser.
L : Selon moi, l’éloignement physique qu’il met entre lui et les soldats représente la distance qu’il veut mettre avec eux.
M : Justement il est sergent et eux prisonniers. Ils ne sont pas de la même patrie et de plus, ils étaient en guerre. Il est donc normal qu’il veuille prendre de la distance.
S : C’est compréhensible mais ce sont des enfants qui n’ont pas voulu cette guerre.
M : En fait, je pense que le sergent prend du recul pour ne pas s’attacher à ces enfants puisqu’il sait qu’ils vont mourir. Mais malgré ça, des liens se créent.
L : Oui ! Lorsque la caméra fait un gros plan du sergent, je n’arrivais pas à décrypter les émotions sur son visage car son visage était fermé.
S : Mais pourtant dans ses yeux, je pouvais voir de la colère, de la douleur et de la tristesse !
M : C’est normal, il était très proche d’eux ! Moi aussi, ça me ferait de la peine.
L : Et à la fin cette scène, on ne sait pas ce qui ce passe puisqu’il y a une ellipse.
S : On ne voit plus rien, c’est brutal et je me demandais si les soldats étaient tous morts.
Après cet échange, les trois filles se séparent.